Les eaux troubles du mojito de Philippe Delerm : un moment de dolce vita

Philippe Delerm
Lu aux éditions Points
112 pages

Comment faire plaisir et mettre du baume au cœur dans notre quotidien ? La réponse se trouve dans Les eaux troubles du mojito et autres belles raisons d’habiter sur terre de Philippe Delerm car « Oui, la vie est une comédie légère, avec des gags, beaucoup de ridicules sociaux et de la solitude. Oui, les gens se dévoilent et ne commencent à s’aimer qu’à la fin, comme dans les pièces de Marivaux. Oui, l’été se ressemble. Oui, le matin la vie est neuve ; si bonne à boire quand on se lève le premier. On marche, on regarde la mer, on attend le café. On fait son film. »


Au sein de ce recueil, Philippe Delerm nous retrace quarante-deux récits très brefs (2-3 pages maximums) comme des petits plaisirs de vie. Il redonne de la couleur et de la valeur à des objets ou des situations qui pourraient nous paraître fades ou franchement agaçants. Ainsi, il donne saveur à une pastèque, à un navet et bien sûr un mojito. Il voit le positif à se faire saucer par une averse ou à être pris dans une énième grève de notre chère SNCF. Et pour finir il se délecte de toutes ces situations qui peuvent paraître habituelles tel qu’un enfant qui lit, une soirée d’été, un après-midi sur la plage…




Ce fut pour moi une découverte totale de la plume de cet auteur (ne me jetez pas de cailloux svp). Je ne suis pas franchement friande des nouvelles ou histoires car j’ai tendance à m’ennuyer rapidement et pourtant, tout comme pour Comme une respiration de Jean Teulé et Nouvelles mythologies de Jérôme Garcin, j’ai pris beaucoup de plaisir avec cette lecture.
L’écriture est rythmée, poétique, on se plait à parcourir les nouvelles qui composent ce court livre et on ne voit pas passer les pages grâce à la fluidité de la plume.

« Bruges est un livre. On s’y promène le long des canaux, de préférence au mois d’octobre, quand la rousseur des feuilles se mêle à tous les gris, aux derniers soleils tièdes. […] Alors la poésie de Bruges efface le tourisme, l’opulence des autochtones, et la réalité devient reflet. » 

Philippe Delerm a ce don pour mettre en avant les belles raisons d’habiter sur terre, de profiter de ces bons moments même lorsqu’ils semblent négatifs. Et ça fait du bien, ça change notre regard sur notre quotidien. Est-ce suffisant pour garder la pêche dans le temps ? Ça c’est à chacun(e) d’entre nous de s’en donner les moyens et de se référer, pourquoi pas, à cette petite bible des plaisirs quotidiens.  

Certain(e)s penseront que ce n’est pas une lecture indispensable. Certes, soyons sincères ce n’est pas LE Graal littéraire mais c’est un livre qui fait du bien, un livre qui permet de décompresser. 
Et une chose est sûre, en le lisant, on se surprend à rire ou sourire, à s’identifier dans certaines situations et à être transporter dans certains endroits comme à Paris sur le pont des Arts en compagnie de ses (ex) cadenas «  … quand le soleil vient jouer sur le métal, c’est beau, les cadenas d’amour. Tous les messages contigus dessinent une barrière d’or, en arche sur le fleuve. Paris ne s’en plaint pas, Paris est la pierre philosophale. En cinq ou six années, beaucoup de ces amours se sont évanouies sans doute, mais c’est bien comme ça, la trace en est restée, dans la rumeur des voies sur berge qui monte vers les ponts comme une brume. Est-ce vraiment si lourd, de vouloir pour l’amour un peu d’éternité ? Les cadenas d’amour sont d’or, le soir ou le matin : il n’est rien de plus léger que la lumière. »

En bref, un livre parfait à offrir (Noël approchant à grand pas), à garder dans son sac, ou à (re)lire lors des premiers jours de vacances sur le transat.

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