De la bombe de Clarisse Gorokhoff : un premier roman qui fait BOUM !

Clarisse Gorokhoff
Paru en mai aux éditions Gallimard
264 pages

« Moi aussi, je suis inquiète, terriblement même. Inquiète des états en général - celui du monde comme ceux de mon âme. [...] Inquiète que rien ne se produise mais que tout explose.»
Tic … Tac … Tic … Tac … Première page, premier choc. Nous sommes sur les rives du Bosphore, Ophélie une jeune française venue vivre à Istanbul s’apprête à poser une bombe dans la cabine d’une piscine d’un luxueux hôtel de la ville.  
Tic … Tac … Tic … Tac … Pourquoi cette jeune femme souhaite-t-elle commettre un tel acte ? Est-ce par conviction politique, religieuse ?
C’est alors que je me suis dit comment réussir à passer plus de 200 pages avec une apprentie terroriste ? Comment Clarisse Gorokhoff va-t-elle réussir à m’emporter aux côtés de cette narratrice meurtrière ? 
Incontestablement par son talent ! Car Clarisse Gorokhoff parvient avec brio à convaincre son lecteur de marcher sur les traces de ce qui a poussé cette jeune femme à perpétrer l’impensable.

Sans emploi, hébergée gracieusement dans un quartier chic de la ville par son amant, un certain Sinan, Ophélie mène une vie que l’on pourrait croire être une vie de débauche : sexe, drogue et l’on pourrait presque ajouter rock’n roll. Mais c’était sans compter sur l’emprise de la chambre 432 du Four Seasons Bosphorus dans laquelle elle rejoint régulièrement, sex-appeal sur son 31, Sinan. Dans laquelle elle rencontre aussi la magnétique Derya, employée de l’hôtel, sensuelle, sexuelle et surtout engagée dans la cause qui divise son pays. Derya, cette femme hypnotisante et Kurde qui aura un grand rôle dans la suite des événements. 
« A force de ne pas parvenir à me faire aimer d'un seul individu, il me reste la possibilité de me faire haïr du monde entier. »
Ainsi, cloîtrée chez elle après l’explosion et avant la fuite, on découvre qui est Ophélie, son enfance, ses blessures secrètes qui l’ont menées au voyage, au plaisir charnel sans lendemain. A travers de courts chapitres, Clarisse Gorokhoff nous embarque dans l’intimité de cette jeune femme à laquelle on s'attache : la domination psychologique que Sinan a sur elle, sa mère, indigne, sa relation avec son seul ami Eliot ou encore sa voisine hystérique. Sans détours, elle nous conte son chemin. Rude, sinueux, tortueux. Jusqu’aux regrets, jusqu’aux morts et aux rencontres de cette nuit où tout à changer, où la bombe à exploser (mais d’ailleurs a-t-elle seulement appuyé sur le détonateur ?) et où l’aventure la conduira à fuir la ville. 

Si le thème ne prête pas à rire bien contraire, l’écriture de l’auteure est si bien maîtrisée, si subtile que nous ne pouvons cependant pas nous empêcher de sourire de certaines situations tragi-comiques. Que l’on se rassure, cela n’enlève en rien la crédibilité de l’histoire puisque chaque détail est extrêmement bien étudié, et la mise en scène est, si j’ose dire, détonante. En harmonie parfaite avec le style incisif et envoûtant. Et j’aime tellement ces romans où l’on se sent bousculer, où les belles phrases côtoient le cru, où la nuit danse avec l’aube, où la tragédie se marie avec le burlesque. De la bombe n’est rien de moins qu’un cocktail explosif de tout cela réunit en seulement 264 pages que l’on tourne à vitesse grand V. 
« Voilà ce que je veux : enterrer tous les morts de la terre, ceux que j’ai tués à l’hôtel, derrière mes lunettes de soleil, et même ceux à qui je n’ai jamais rien fait. J’aimerai caresser ce que j’ai dégradé (car je ne pourrai pas le réparer). A tous ceux dont j’ai abîmé la vie, je me promets de bâtir des temples de souvenirs, de pardon et de reconnaissance. » 

Une lecture accompagnée de …

A l’image de l’écriture on a envie de boire une vodka mais aussi parfois du champagne dans ces moments de luxure. On a envie d’écouter du rock mais aussi des mélodies tragiques qui vous font tour à tour goûter à la folie et aux frissons. Prenons l’exemple de :
Sympathy for the devil de The Rolling Stones
Broken de Jake Bugg
Bones de Radiohead
November de Max Ritcher
Karma Police de Radiohead
Hotel California de Eagles 



Une lecture dans le cadre de la sélection des 68 premières fois comprenant : 

La téméraire de Marine Westphal
Ne parle pas aux inconnus de Sandra Reinflet
La plume de Virginie Roels
Mon ciel et ma terre de Aure Atika
Marx et la poupée de Maryam Madjidi
Presque ensemble de Marjorie Philibert
Principe de suspension de Vanessa Bamberger
Outre-Mère de Dominique Costermans
Marguerite de Jacky Durand
Les parapluies d'Erik Satie de Stéphanie Kalfon
Maestro de Cécile Balavoine
Nous, les passeurs de Marie Barraud
La sonate oubliée de Christiana Moreau
Le cœur à l'aiguille de Claire Gondor
La tresse de Laetitia Colombani

Commentaires

  1. Pourquoi pas, si ce livre croise mon chemin. Tu es plutôt convaincante...

    RépondreSupprimer
  2. Rien que pour la mention de Karma Police, je valide !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Haha et au-delà de mes supers goûts musicaux (lol) je pense qu'il peut te plaire

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés