Police d’Hugo Boris : immersion au cœur d’un huis-clos sous tension

Hugo Boris
Paru chez Grasset le 24 août 2016
198 pages


Dans le cadre des Matchs de la rentrée littéraire organisés par PriceMinister, j’ai eu la chance de recevoir Police d’Hugo Boris. Un roman qui avait rejoint ma très longue wishlist et surtout un roman à la thématique intrigante et d’actualité.


Virginie, Artistide et Erik sont policiers. Ils sont appelés en renfort suite à un incendie dans une prison afin d’escorter à Charles de Gaulle un immigré du Tadjikistan (vous voyez ce petit pays là, à la frontière de l’Ouzbékistan... oui merci Wikipédia) nommé Asomidin Tohirov.
Mais tout ne va pas se dérouler comme prévu, alors qu’ils sont en route vers l’aéroport, Virginie va fourrer son nez là où elle ne devrait pas et ensemble ils vont découvrir que cet homme, s’il est reconduit dans son pays, risque probablement de mourir. 
Ainsi, nous entrons dans un huis-clos à la tension palpable où peu à peu, Hugo Boris va venir tisser autour de cette histoire la vie de ces individus. Face à cet inconnu menacé de mort pour avoir dénoncé les abominations de son pays, tous trois vont avoir un cas de conscience : obéir aux ordres ou faire preuve d’humanité à l’encontre de cet homme si frêle et peu loquace.

« Aux yeux des Français, la police est tracassière, provocatrice, basse du front, fainéante, alcoolique. Aux yeux de ce Tadjik, elle est forcément tortionnaire et assassine. »

Voilà un roman dont on a dû mal à se détacher tant que la dernière page n’est pas refermée. Ici pas de happy-end mais juste une réalité balancée de plein fouet aux visages de ces trois protagonistes.

J’ai ressenti beaucoup de sympathie pour Virginie, Erik et Aristide, trois personnalités différentes mais qui ensemble forment un joli trio. A l’instar du film Polisse de Maïwenn, Hugo Boris décortique psychologiquement la personnalité et les sentiments enfouis de ces trois flics bousculés par la vie et leur métier. Derrière leur gilet par balle, leur état d’esprit parfois blasé, se cachent des cœurs capables de souffrir, capables de pleurer, capables de s’attendrir.
On a ainsi la femme un peu perdue qui se sent délaissée par son mari et trouve du réconfort dans les bras de son collègue, ce qui ne sera pas sans conséquences. Puis il y a le boute-en-train, un peu lourdingue, qui cache en réalité sous sa carapace un cœur que l’on devine tendre. Et pour finir, l’expérimenté qui vit constamment dans la peur.
Réel point fort qu'est cette humanisation si touchante, car c’est un aspect bien trop souvent négligé dans nos médias qui ne nous offrent que du sensationnel.

« On pourrait croire qu'il s'est mithridatisé contre les coups jour après jour, immunisé contre la violence du monde par l'accoutumance, à doses progressives. Il s'est juste désensibilisé. Il n'est pas plus résistant, ni plus fort, ni plus professionnel que les autres, juste plus détaché. Sur son visage, un masque se fige d'année en année. Mais à l'intérieur, l'hémorragie a commencé. Le matin, en s'habillant, il a pris l'habitude de choisir son caleçon en se disant que, s'il devait y rester aujourd'hui, il tient à être présentable, au dépositoire, à la morgue, sur la table d'autopsie. Ça ne dure qu'une seconde mais il y pense. Il choisit le caleçon qui ne ridiculisera pas aux yeux du légiste. Il n'arrive plus à compartimenter. »

L’autre force de ce roman ? Le rythme rapide - comme les décisions prises par les hommes et les femmes de la fonction, comme leurs réactions possibles lors des situations d’urgence – qui ajoute de la tension du roman.
Et si l’écriture n’a rien d’élégant, elle se marie parfaitement bien à l’ambiance du roman et à la thématique : directe et concise. Ou peut-être est-ce l’ambiance qui se marie à l’écriture d’Hugo Boris, en tout cas cela donne un mélange très réussi.

Je n’ai qu’un seul regret : que l’auteur ne se soit pas étendu davantage sur le portrait de ce Tadjik qui aurait mérité un peu plus d’intérêt. Il ne manquait que cela au coup de cœur. Malgré ce détail, j’ai été conquise par ce roman palpitant, par sa rythmique et par l’écriture d’Hugo Boris.

Commentaires

  1. Je me réjouis de le découvrir ! Je l'ai emprunté samedi à la bibliothèque et attend de terminer ma lecture actuelle pour m'y mettre. J'espère qu'il me plaira autant qu'à toi. L'histoire me parle en tous cas.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @QueLireBlog Je pense qu'on ne peut y rester insensible (tu comprendras pourquoi :-)). J'ai hâte de connaître ton ressenti, tiens-moi au courant.

      Supprimer
  2. Je suis une bille de ne pas avoir demandé celui-là pour les MRL, il me faisait tellement envie ! (et c'est pas ta chronique qui va me convaincre du contraire)
    J'ai reçu Chanson Douce, j'ai quand même très hâte de le commencer...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Noël approche, une idée de cadeau avec ce roman d'Hugo Boris :p
      Chanson Douce, je n'est pas encore franchi le cap de cet achat. Vraiment peur de la thématique mais je pense me faire violence tant les échos reçus sont excellents. Je vais suivre avec attention ton ressenti dessus.

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés